Lundi 15 octobre 2018, la perturbation est bloquée par les hautes pressions présentes sur l’Europe.
Rencontre avec Sandrine Pannetier et Bénédicte Fabien de l’agence de tendances LeherpeurParis, rue de la Vrillière.
Sandrine Pannetier Il y a une quinzaine de personnes dans le bureau. Il y a chez nous ce qu’on appelle le planning stratégique, Bénédicte en est la représentante, elle est directrice de la prospective, et il y a la partie purement studio style. Nous sommes la troisième génération de bureau de tendance. Martine Leherpeur a fondé le bureau il y a trente ans. Elle nous l’a transmis il y a six ans, Martine avait travaillé avec Maïmé Arnodin. Et Martine est la femme d’Antoine Arnodin, le fils de Maïmé. Nous avons donc la spécificité d’avoir un regard historique. Nous partageons les locaux avec Wolkoff & Arnodin, Antoine est administrateur de notre société et a la mémoire du métier que faisaient Maïmé et Denise [Fayolle]. On a encore des archives de couleurs en bas. Entre Maïmé et les plus jeunes du bureau, il y a quatre générations qui se sont transmis des manières de faire. Mais le métier a évolué.
MP Quelles évolutions ?
S. Maïmé faisait des cahiers de tendances, parmi d’autres choses, mais c’était important. Un cahier devait concentrer la vision d’une saison. Elle a créé les premiers cahiers de coloris début 1960 pour que l’industrie textile, du filateur jusqu’au distributeur, soit en phase avec les tendances. Ils anticipaient de deux ans la saison. Ce n’était pas des cahiers de tendances tels que nous les connaissons aujourd’hui. Les cahiers de coloris de Mafia étaient plus l’équivalent de la gamme actuelle de Première Vision : ils donnaient véritablement le « la » coloristique à toute la profession. Après chacun interprétait le message avec son vocabulaire style et son identité. Mafia faisait déjà, aussi, du conseil sur mesure.
Martine, elle, n’a plus voulu faire de cahiers parce qu’elle estimait que si c’était un cahier d’inspiration, il ne pouvait pas être le même pour tous.
La mode avance sur deux pieds, celui du vocabulaire commun et celui de la singularité. Il y a des codes communs mais tout le monde ne doit pas se les approprier de la même manière. Martine a fondé le bureau sur cette idée qui fait que nous ne faisons que des tendances sur-mesure. Elle était contre le principe des cahiers pour une raison essentielle : « ce sont des outils dangereux, disait-elle, à ne pas mettre dans toutes les mains faute de capacité à extrapoler ou filtrer le “trop” de tendances présentées » et elle pensait qu’il fallait des professionnels très pointus pour faire ce travail.
Bénédicte Fabien Aujourd’hui, ces fameux cahiers, qui figent quelque chose sous la forme imprimée disparaissent, même dans les bureaux qui ont toujours fait des cahiers, au profit de cahiers digitaux.
S. On cherche des imaginaires créatifs, un ensemble de signes culturels qui s’agrègent et résonnent les uns avec les autres et qui font, qu’à un moment, on va avoir envie de jaune, par exemple. C’est un ensemble d’expositions, de clips, de musiques… qui définissent des imaginaires créatifs. Ils existent : on ne les fige pas mais on cherche à les identifier.
B. Le métier a changé aussi dans la mesure où la parole de la directrice était, avant, celle d’un gourou, d’une prêtresse. C’est pour ça que les agences de tendances étaient des sociétés éponymes. Ce n’est plus le cas, comme les rédactrices mode.
S. L’époque détrône les Pythies.
B. Par les réseaux digitaux, on capte une mode de plus en plus horizontale.
S. Les supports sont de plus en plus mélangés : vidéos, clips, musiques… Plus uniquement, des formes, matières, couleurs, dessins, silhouettes, tableaux… mais de plus en plus des éléments qui provoquent de l’émotion, en amont des formes, même si le vocabulaire visuel fait toujours partie du métier. On ne fait plus travailler les équipes sur les tendances produits pures, on leur demande de remonter à l’étage au-dessus, de retrouver l’air du temps, cet ensemble d’éléments créatifs, musicaux, artistiques, architecturaux… et de remonter ainsi à des tendances plus globales, à des mouvements de société qui font bouger les choses. Quand on donne un cahier de tendances, on oriente la création, voire on encourage la copie. En remontant en amont, vers un imaginaire créatif, chacun peut à la fois être assuré d’être dans le contemporain et en même temps être dans une création propre. On donne des éléments en kit pour que l’appropriation soit possible.
B. C’était déjà le projet de Martine : l’air du temps et le sur-mesure, c’est notre héritage des années 1980. Il s’agit d’être des éponges des signaux créatifs forts et les décortiquer pour qu’ils puissent servir à raconter des histoires.
MP Quelle forme prennent vos présentations ?
B. Ce sont des pages avec peu de visuels avec un texte bref qui raconte et décode ce qu’on y a mis. Le mot appelle l’image et l’image appelle le mot.
S. Avec un champ sémantique très précis, mais les matériaux sont d’abord visuels.
MP Qui lancez-vous à la chasse de l’air du temps ?
S. On est tous déblayeurs. De nuit et de jour. Dans le bureau tout le monde cherche, les stylistes et ce que nous appelons les planneurs stratégiques qui sont plutôt du côté des évolutions des attitudes et de l’analyse de la marque. Tout le monde a une culture créative et une forte culture de mode. Avec l’âge et un regard qui a une profondeur temporelle, on arrive à distinguer les épiphénomènes des choses plus structurantes. On est capable de dire : « Ça s’inscrit dans tel ou tel courant », « Ça, c’est nouveau », ou « On a déjà vu ça mais pourquoi ça s’est transformé ? ». On est une quinzaine en fixe et on travaille avec des freelances. Le feuilletage des générations nous aide beaucoup.
B. C’est une force d’avoir plusieurs générations. En fonction de l’expérience, de l’âge et de la maturité, on ne capte pas les mêmes choses. Quand on est plus senior, on va plus écouter, agréger et dégager des histoires fortes. Et on va demander souvent aux plus jeunes de faire « les oiseaux » qui vont nous ramener des choses qui vont ensuite nous permettre de raconter une histoire.
MP D’où viennent les gens du bureau ?
S. Au style, ce sont surtout des gens avec une culture de mode, du vêtement et du style pour ne pas passer à côté des signes et de leur interprétation. C’est une spécificité de notre bureau : on travaille à 70 % pour la mode.
B. Et les industriels et les gens du design viennent nous chercher justement pour cette culture mode.
S. Et pour la temporalité de la mode. Même quand on travaille sur des voitures, on vient nous chercher pour notre capacité à réinventer les choses tous les six mois. Un véhicule, c’est six ans de développement, donc on ne gère pas les mêmes échelles de temps. On a travaillé pour des parcs immobiliers : quand vous refaites une rue, les échelles de temps ne sont pas du tout celles de la mode. On apporte une agilité, le fait de pouvoir tout reprendre à zéro et de le faire avec plaisir. Les industries « lourdes » viennent chercher cette capacité-là dans notre bureau.
MP Quelle est la singularité de cette temporalité de la mode ?
S. La coupure des saisons printemps-été/automne-hiver reste reine. Mais à l’intérieur, vous avez des sous-échelles de temps, des découpages temporels plus fins. Et puis la mode a des temps superposés. En ce moment par exemple, l’hiver 2018 commence concrètement dans les magasins et en même temps, les collections de l’été prochain sont déjà commercialisées sur les salons depuis septembre et on est en train de boucler les collections de l’hiver 2019. Et on commence déjà à travailler pour certains filateurs et Première Vision pour l’été 2020. Pour l’été 2020, la concertation internationale couleurs de Première Vision a eu lieu fin septembre, en discussion partagée avec les autres bureaux. Première Vision est en amont de la filière, pour les fabricants de tissus, cuirs, accessoires, dessins… C’est avec Première vision que commencent les paroles de la saison, donc il faut qu’on soit au point sur les couleurs et les envies matières. En résumé : les couleurs de l’été 2020 sont en cours ; les produits de l’hiver 2019 sont en conception ; les vêtements de l’été 2019 sont en production et, enfin, l’hiver 2018 est en magasin… On est en même temps sur toutes ces saisons.
MP Ce sont toujours les couleurs en amont ?
S. Oui, les fils d’abord. C’est l’amont qui prend la main, mais pour « sortir » de la couleur, il faut avoir pensé des imaginaires créatifs aussi.
B. Dans le cheminement traditionnel, qu’on connaît depuis des années avec le rythme des salons, c’est Première vision qui ouvre la saison avec la sortie de la gamme qui est une concertation des tendances pour arriver jusqu’à LA gamme de la saison.
MP La « concertation couleurs » ?
S. C’est une réunion qui rassemble les intervenants du métier. Il y a les bureaux historiques1 et des gens qui font du conseil style et couleur en indépendant. Chacun arrive avec ses envies et souvent, au final, les envies convergent.
MP Des « envies » ?
S. Des envies, oui. La couleur dialogue avec l’émotion. Par exemple, il y a un moment où on a tellement travaillé une couleur qu’on n’en peut plus, et cette envie est la même dans toute la chaîne de production. Quand vous êtes styliste et que vous avez « mangé » du bleu, du bleu, du bleu, vous avez surtout envie de ne plus voir de bleu. C’est la même chose pour les journalistes : quand vous êtes à votre quatorzième shooting de bleu… Et comme filateur ou styliste, quand vous avez déjà quinze échantillons de bleus, vous avez envie d’autre chose. Une nouvelle couleur émerge parce qu’on baigne tous dans les mêmes signes créatifs. Observer les tendances, c’est ça : saisir les phénomènes de respiration mais aussi de saturation. Un styliste qui doit tous les six mois inventer quelque chose cherche des signes vierges, qui ne sont pas épuisés, et ce seront ses nouveaux terrains de jeu.
MP Des accidents industriels arrivent ?
S. Toutes les industries doivent faire de la prévision… Nous, nous ne sommes pas à l’endroit des accidents. Nous ne passons pas les commandes. Ce sont plutôt ceux qui sont chargés des prévisions des ventes qui gèrent les accidents. La mode est une science inexacte. Mais du début à la fin, l’envie est très importante car s’il n’y a pas d’envie, il n’y a pas de système créatif vivant, et alors il y a à la fin un vêtement mort. Ce qui fait la force de la mode, c’est l’imaginaire. Pour avoir une force imaginaire derrière un vêtement, il faut avoir une inspiration.
MP Le découpage en saisons a-t-il évolué ces dernières années ?
B. Oui. Il y a eu un énorme boom dans l’industrie de la mode avec l’arrivée de Zara [la première boutique ouvre à Paris en 1990] qui a complètement cassé les rythmes printemps-été/automne-hiver, et qui a démontré une capacité de production incroyablement rapide. Il y a à peine trois semaines entre l’intention produit et la mise en magasin… Ce phénomène, Zara a mis un pavé dans la mare de la « rythmique mode ». Ce phénomène « zaraïsant » est décuplé par l’instantanéité des réseaux sociaux. L’industrie de la mode, qui était déjà la plus rapide dans ses rythmes, est devenue encore dix fois plus rapide… Jusqu’à imprégner des marques de luxe qui ont dû rentrer dans ce rythme intenable qui fait que des directeurs artistiques quittent le navire. On leur impose de créer, et pour le luxe donc avec des incitations fortes et non pas suiveuses, mais à un rythme fou…
S. On nous demande des tendances Insta [Instagram] : « Quelles sont les couleurs qui buzzent sur Insta » ? Non pas pour développer la prochaine collection mais pour réagir à celle qui est en magasin… Le système essaie de gérer à la fois le process historique avec Première Vision, etc. et l’hyper instantanéité des réseaux sociaux.
B. Aujourd’hui, on gère deux temporalités. La machine traditionnelle, parce que finalement il faut quand même fabriquer des tissus pour fabriquer ensuite des vêtements. Il ne suffit pas de les montrer sur Instagram, il faut les produire et cela prend du temps. Mais à côté, il y a le rythme effréné des capsules, les micro-collections… Et un bombardement permanent d’incitations sur les réseaux. Devant cette révolution, bureaux de tendances comme de presse – et tout l’univers de la mode – se demandent comment ces temporalités vont continuer à vivre en parallèle. Pour l’instant, sur Instagram on est capable d’identifier les couches de prescripteurs, les niveaux de prescriptions… mais nos clients sont pour le moment surtout en réaction par rapport à Instagram.
[Bénédicte nous quitte, « attendue par une femme en lunettes noires »].
MP Comment glanez-vous les « signes du temps » ?
S. Le web est un lieu de fabrique central de ces signes aujourd’hui. Les lieux institutionnels que sont les grandes expositions étaient pour nous des temples. Dans notre métier, malgré tout, les expositions restent importantes, notamment de mode. Comme il y a peu de conservation des vêtements et pas de galerie permanente de vêtements anciens, chaque exposition est un moment qui crée de la culture commune, des références communes. L’exposition Margiela, tous les acteurs de la mode l’ont vue. Mais tout est compliqué par le web : les contre-cultures y ont trouvé un espace pour se déployer. Elles avaient un rôle dans la mode mais elles ont un rôle encore plus fort aujourd’hui. Le digital comme réseaux d’informations créatives, « libres », offre une richesse incroyable. Tout le monde l’a très bien compris, pensons à Supreme chez Vuitton… Les contre-cultures sont là, et on les observe. Et puis il y a ce qu’on appelle les « Insta artistes », les « Insta brand », plus mainstream mais qui proposent de nouvelles formes d’expressions.
MP Quel est le rôle du cinéma, des séries ?
S. Les films qui portent des esthétiques fortes sont centraux. Mais les séries, et les clips portent des signes très forts aussi. Le fait qu’il y ait des saisons pour les séries crée une addiction et des rendez-vous qui sont de vrais moments culturels partagés, collectifs. Les séries sont souvent très soignées sur le plan esthétique et de la narration. Notre métier, c’est juste d’être des passeurs, de mettre en forme les choses. Il y a des gens qui sont les premiers touchés par les phénomènes créatifs nouveaux, qui les vivent, qui les transmettent, et nous on ne fait qu’observer ces groupes et les phénomènes qu’ils portent.
MP Et quel place donnez-vous au passé ? Au vintage ?
S. La fripe est un système économique mais surtout un endroit où les gens s’approprient des codes et se créent un vocabulaire plus libre que celui de l’industrie. Et c’est un rapport au temps. Olivier Saillard, quand il a pris la direction de J. M. Weston, a dit : « On va dérythmer ». Mettre un historien à la tête d’une maison de chaussures de luxe est symbolique. Son propos est intéressant : non pas s’éloigner des saisons, mais s’éloigner du rythme effréné de la nouveauté, des capsules, de la démultiplication des collections. Si on veut vraiment « dérythmer » la mode, peut-être qu’il faudrait être plus proche de la réelle temporalité du vêtement, revenir à « il fait chaud », « il fait froid ». On a fait une conférence intitulée « fashion météo ». Nos clients se sont éloignés de la météo. Les seuls qui la regardent encore tous les matins, ce sont les vendeurs : plus on est proche du terrain, plus on est météophile. On n’achète pas de mode quand il pleut. Mais maintenant, on est tellement inquiets sur le climat que la question de la météo revient. À force de penser des thématiques, des cadencements, de forcer des collections, on en avait oublié qu’à la toute fin un voile de coton c’est agréable l’été. La succession des collections fait qu’en février, il n’y a plus de doudounes, plus de bonnets, en magasin. Sauf qu’en février, il fait froid. C’est déjà redire ça. Et repenser les moments d’intersaison, les matières… Même en termes de lumière : la lumière de septembre n’est pas la même que celle de mai. Ce sont des moments miroirs dans l’année.
MP Vous êtes entendues ?
S. Tout le monde essaie. Je ne dirais pas que la mode n’entend pas, mais le problème est qu’il y a tellement de choses à écouter que les gens sont perdus. Nous avons des clients qui ont envie de bien faire mais qui sont face à un système monstre… il faut vendre à la fois au bout du monde et localement… C’est compliqué de s’y retrouver.
MP Vous travaillez surtout pour des entreprises françaises ?
S. On travaille pour la France et pour des marques françaises ou européennes, de différents niveaux de gamme. Mais les marques de luxe ne font qu’un faible pourcentage de leur chiffre d’affaires en France : elles sont françaises mais leurs problématiques sont internationales. On travaille aussi pour des marques chinoises. Nous avons une filiale en Chine depuis 2004. Mais en quinze ans, le travail a complètement changé : on travaillait pour des Français qui voulaient s’implanter en Chine, puis on a travaillé pour des Chinois en Chine qui s’adressaient à l’énorme marché intérieur. Maintenant, certains de nos clients chinois rachètent des marques françaises2. Certaines marques françaises nous achètent des missions pour comprendre les Chinois qui viennent de les racheter… Les Chinois rachètent les Français parce qu’ils veulent intégrer un système créatif et une manière de faire. Quand ils achètent nos prestations, ils achètent une manière de créer à la française, comme un produit de terroir mais créatif. Mais ils n’ont pas les mêmes modes de fonctionnement : nous sommes donc missionnés pour aider les Français à comprendre les Chinois qui veulent comprendre les Français.
MP Vos clients vous demandent de sécuriser leurs créations ?
S. Oui, bien sûr. Mais on vient surtout nous voir pour retrouver de la liberté de création. Le luxe a une dynamique particulière car il est en forte croissance. Le prêt-à-porter, lui, est en décroissance. Il y a une énorme tension chez les industriels, et qui fige la création. C’est dur de prendre une décision créative quand vous avez une pression importante sur le chiffre d’affaires. Les gens viennent plus nous voir pour qu’on les accompagne, les sécurise dans un saut créatif… On leur donne une autorisation qu’ils n’arrivent plus à se donner eux-mêmes. La pression est très forte dans la distribution. On a des clients qui sont en PSE [Plan de sauvegarde de l’emploi qui « vise à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement économique est inévitable »]. Les restructurations sont dramatiques sur le plan humain. La tension dans nos métiers est très contraignante.
MP Vous ressentez les inquiétudes de l’époque ?
S. La mode enregistre vraiment toutes les inquiétudes de l’époque. L’inquiétude sociale, sociétale, l’inquiétude climatique… « #Me too »… Je n’aurais pas dit ça il y a dix ans. On ne se posait pas la question du dégoût capitalistique dans la mode. La mode a tous les défauts du capitalisme. Il y a toujours eu des questionnements sur la mode, sur son économie, sur la place des femmes… mais en ce moment tout s’agrège avec une intensité nouvelle. En même temps, on a dans nos clients des entreprises en plein PSE et des marques dont le chiffre d’affaires se compte en milliards. Ces échelles sont disproportionnées. Il y a quelque chose à l’intérieur du système qui s’est hypertrophié, et cette hypertrophie crée une hypertension. Le système est en crise profonde. Entre les représentations de la femme, des corps, le capitalisme, la manière dont on paie les gens, les savoir-faire délocalisés, le burn-out des directeurs artistiques… la mode condense tous les maux de l’époque. Je ne pense pas qu’il y est une seule personne dans la mode en ce moment qui ne soit pas consciente de ça. Tout le monde se demande : « Qu’est-ce qu’on pourrait faire de bien ? »